Texte par Dietrich Hanke, ingénieur en mécanique des fluides et créateur de Maui Ultra Fins.

Afin de calculer les performances d’un voilier, d’une planche à voile ou d’un kitesurf, nous devons étudier les forces et les moments d’action et trouver les conditions dans lesquelles toutes les forces et les moments sont en équilibre (loi de Newton).

Cette condition est un soi-disant état régulier du système qui nous permet d’identifier la vitesse. Parce que la voile d’une planche de planche à voile est reliée à la planche par l’intermédiaire d’un pied de mat et que le moment de l’inclinaison est contrebalancé par le poids du rider, il n’y a pas de gite comme c’est le cas sur un voilier classique. Donc, tous les problèmes propres aux bateaux à voiles et la pression de la voile sur la coque entrainant la gite du voilier n’existent pas. Ainsi, toutes les forces et moments peuvent être calculés de manière presque indépendante pour la voile, tandis que la planche est utilisée en tant que variable indépendante. Pour calculer tout cela, seuls la puissance maximale de la voile, la force du vent et l ‘angle de la course, ainsi que la portance/ trainée de la voile et de l’aileron doivent être pris en compte.

Forces

Forces

Les base d’aérodynamiques et d’hydrodynamiques nous permettent de calculer les forces et moments en présence et sont bien connues par la recherche pratique et théorique sur les voiliers depuis bien longtemps.

En considérant une planche à voile, nous avons une force aérodynamique qui produit un moment de gite, contrebalancé par le poids du rider (schema 1). Etant donné qu’il y a un angle de gite négative lorsque le rider se penche avec la voile, une portance verticale (Fv) est créee ce qui réduit le poids total de la planche à voile

 

Dessin 1: La puissance de voile Maximale en considérant le moment de gite compensé par le poids du rider

L’équation du moment de gite définit la puissance maximale de la voile qui peut être créée par le poids du rider. En utilisant des distances traditionnelles, la puissance maximale que peut générer une voile est égale à environ 40% du poids du corps. Cette force est limitée dans l’absolu sous n’importe quelle force de vent, à n’importe quelle vitesse et sur n’importe quelle course. Etant donné que le mat est connecté à la planche par un pied de mat, il n’y a pas de moment de gite qui sont transférés à la planche; Toutes les forces sont transférées par le mat et par les pieds à la planche.

La force totale de la voile peut être divisée en un composant qui pousse dans le sens de la navigation, qui est la poussée conductrice de la voile. Dans cette puissance conductrice, la portance et la trainée de la voile entrent en jeux. Une trainée de voile faible amenerait la puissance totale de la voile dans la direction de navigation et créerait encore plus de puissance.

Le deuxième composant de cette force est la poussée latérale qui doit être compensée par l’aileron. La quantité de poussée et de force latérale sont seulement fonction de l’angle du vent apparent qui depend lui même de la vitesse de navigation par rapport à la vitesse du vent.

Ainsi, l’angle de vent apparent, la poussée et la force latérale ne sont pas des constantes et varient en fonction de la vitesse de navigation.

De l’autre côté, nous avons la trainée hydrodynamique de la planche et de l’aileron qui dépendent uniquement de la vitesse de la planche et qui sont des forces opposée à la poussée. Quand toutes ces forces sont égales alors la vitesse maximale est atteinte (schéma 2 et 3). Pour aller le plus vite possible, la poussée doit être aussi élevée que possible et la trainée de la planche aussi faible que possible.

Figure 2: Forces on a windsurfing board, side view

Schéma 3:Forces aéro et hydrodynamiques et définitions d’angles sur une planche de windsurf

Les limitation de la puissance de la voile

-En fonction du poids du corps

Comme mentionné plus haut, la puissance maximale de la voile est limitée à 40% du poids du corps du rider. Pour un calcul de la vitesse maximale, la puissance de la voile est utilisée en valeur constante alors que la vitesse est une variable indépendante. Cette approche représente des conditions où le le rider contrôle l’ouverture de la voile en reculant son corps au maximum pour obtenir le maximum de puissance et de vitesse. Un changement de poids est comme une manette de gazs qui offre différents niveaux de poussée et donc de vitesse.

En fonction de l’angle du vent

Lorsqu’on navigue sur une course spécifique et dans une force de vent spécifique, il est bien connu que l’angle du vent apparent peut être réduit en augmentant sa vitesse, schéma 4

Schema 4:Angle du vent apparent en fonction de la vitesse et de la force du vent, sur une course à 140 degres

L’angle du vent apparent est fonction de la vitesse (VS) et de la force du vent (VT). Plus le vent est fort, plus l’angle du vent apparent est élevé et plus la poussée est élevée. Mais la réduction de la poussée due à l’augmentation de la vitesse, avec une poussée constante dans la voile est un effet physique inévitable qui en peut pas être supprimé et qui est valide sur toutes les embarcations utilisant la force du vent pour se mouvoir, sur l’eau, la glace ou la terre. Ainsi, pour aller vite, l’angle du vent doit être le plus élevé possible afin de créer davantage de poussée , ce qui signifie que des vents plus forts sont nécessaire pour atteindre des vitesses plus élevées.

Les forces aérodynamiques de la voile

Les forces de la voile pour des mouvements latéraux et horizontaux de la planche en fonction de la vitesse (angle du vent apparent) sont la poussée – et les forces latérales vs la vitesse pour une puissance de voile constante (schéma 5). La poussée se réduit avec la vitesse tandis que les forces latérales augmentent avec la vitesse.

 

Schéma 5: La poussée et la force latérale comparées à la puissance totale de la voile et la vitesse, dans un vent de 20Kt et une course de 120 degrès.

La trainée hydrodynamique de la planche

Le planning a des caractéristiques de trainée où la trainée est constante par rapport à la vitesse. La trainée au planning est tout d’abord directement proportionnelle au poids total de l’équipement de windsurf ainsi qu’à l’angle d’attaque de la planche, indépendamment de la vitesse et de la surface mouillée. Ensuite, nous devons ajouter des trainées de friction et projection proportionnelles au carré de la vitesse. Du au fait qu’en augmentant la vitesse de la planche la planche se soulève, la surface mouillée est réduite automatiquement d’une manière qui fait que le poids total s’équilibre. Avec cela, la trainée est automatiquement minimale sous n’importe quelles condition.

La vitesse maximale est atteinte quand la poussée de la voile et de la planche sont égales. Cet équilibre est atteint lorsque les courbes se croisent comme c’est montré en schéma 6.

Le Schéma rend évident que des vitesses plus élevées sont possibles lorsque la poussée (la poussée inclue la trainée aérodynamique de la voile) est augmentée (on avance la courbe sur le schéma) et lorsque la trainée est réduite (on recule la courbe sur le schéma). la différence entre la force de poussée et la force de trainée divisée par le poids de l’équipement représente l’accélération qui est naturellement égale à 0 quand les conditions de vitesse stables sont atteintes. De plus, il est montré qu’à 66kts la poussée devient nulle. Cela représente la vitesse possible avec une trainée nulle de la planche.

Schéma 6: Poussée Aérodynamique et trainée hydrodynamique VS vitesse sur une cours à 140 degrès, puissance de voile constante.

En résultat, la vitesse de navigation dépend de

  1. La limitation de la force totale de la voile due au poids du corps du rider
  2. L’angle du vent apparent (une fonction de la vitesse et de la vitesse du vent) qui réduit la poussée lorsque la vitesse augmente.
  3. L’angle de la course (plus de poussée aux grands angles)
  4. La trainée de la planche et de l’aileron
  5. La surface de l’eau

Toutes les composantes des trainées aérodynamiques de la voile et du rider font partie de la force totale de la voile. Plus de trainée aérodynamique réduit la poussée

Il est très important de naviguer à un angle plus abattu lorsque le vent est plus fort comme montré dans le schéma 7. La course optimale dépend du ratio VS/ VT ( vitesse de navigation/ vitesse du vent réelle). Pour un ratio VS/VT de 2, 120 degrés est un bon angle. Mais quand un vent plus fort est nécessaire à cause de la trainée de la planche, l’angle optimale passera de 120 à 150 degrés entre 20 et 50 kt de vent.

Schéma  7: La course optimale en fonction de Vs et Vt

schéma 8 montre le calcul de la vitesse maximale que l’on peut atteindre sur une course de 140 degrés

Toutes ces fonctions peuvent être calculées assez simplement et il apparait que le record actuel d’environ 52 kt est ce à quoi l’on pouvait s’attendre.

Schéma 8: Vitesse maximale en fonction du vent pour une course de 140 degrés.

De même,  il y a quelques approximations à cause des données estimées mais les tendances et relations sont correctes et nous permettent d’en déduire les bonnes conclusions

Il apparait que le ratio de vitesse par rapport au vent réel peut être de 2 dans des conditions de vent légères mais s’approche de 1 a plus de 50 kt. Cela signifie que pour aller beaucoup plus vite, beaucoup plus de vent est nécessaire. Le graphique devient très plat après 50kts et il n’y a plus beaucoup de gains de vitesse.

A cause de la nécessité d’équilibre entre la poussée et la trainée pour atteindre une vitesse maximale stable, la courbe de trainée hydrodynamique représente la courbe de la poussée aérodynamique. Elles doivent être égales à toutes les vitesses, en permanence.

Cette équation nous permet de calculer la puissance totale de la voile nécessaire à produire cette poussée. Le Schéma 9 nous montre que la puissance de la voile doit être accrue de manière exponentielle pour atteindre des vitesses plus élevées.

La vitesse maximale indiquée par la puissance de voile maximale qui dépend du poids du rider.

Schéma 9:La puissance totale de voile nécessaire pour un êtat stable à n’importe quelle vitesse. Limite de la puissance de la voile due à la stabilité de gite.. Course 140 degrés

Comment aller plus vite?

Afin d’aller plus vite, la poussée doit être augmentée par davantage de poids du corps et par une réduction de la la trainée de la voile (meilleur foil, taille de voile optimisée) ainsi qu’une réduction des trainées parasites (wish, rider etc). On peut aussi aller plus vite en réduisant la trainée de la planche en réduisant les trainées de projection

L’influence du poids du corps

Le poids du coprs du rider definit la poussée possible grâce au moment de gite plus haut.

Plus il aura de poids et plus la poussée sera élevée mais d’un autre côté plus la trainée de la planche sera élevée (elle doit porter le poids supplémentaire). Ainsi, il peut être calculé que 100N de poids en plus augmente la vitesse de 2kt.

Schéma 10: Influence du poids du corps sur la vitesse de navigation maximale. Poids  de 700 N et 1100

Si on regarde la distribution de la trainée des composants du matériel de windsurf à 52kts comme c’est montré en Schéma 11, on peut estimer quelle vitesse on peut gagner en réduisant la trainée des différents composants du matériel.

Schema 11:Distribution de la trainée sur les composants du matériel à 52kt

Réduire la trainée d’un aileron de 10% donne une réduction totale de la trainée de 1,1%

1,1% de réduction de la trainée crée une augmentation de 0,5% de la vitesse. Cela veut dire aller ‘à 52,26kt au lieu de 52kt, ce qui est 0,26kt en plus.

Si l’on pouvait réduire la trainée du corps de 50% alors on aurait une amélioration de la trainée totale du corps de 5,5%

En terme de vitesse, cela se traduirait par une augmentation de 2,6% ce qui ferait 53,4kt au lieu de 52kt.

Seul un petit nombre d’améliorations peuvent êtres atteints sur les planches de windsurf actuelles en évitant les trainées des composants de la voile comme en optimisant le profil d’attaque, les bouts de harnais, le wish et le rider lui même.

Concernant la planche, la trainée peut être réduite en optimisant les trainées de projection avec un outline spécifique.

Mais en règle générale, aucune grande amélioration n’est possible.

Qu’en est-il des hydrofoils?

L’espoir d’utiliser des foils pour aller plus vite n’est pas très prometteur.

Le foil se comporte comme l’aile d’un avion. Le foil doit offrir la portance pour le poids total de l’équiment et la trainée du foil augmente au carré de la vitesse.

C’est un très gros désavantage comparé à une surface planante ou la trainée est quasiment indépendante de la vitesse.

Voir Schéma 12

D’un autre côté lorsqu on est sur un foil, le matériel est hors de l’eau et ne subit pas les déformations du plan d’eau , ce qui est un gros avantage car il n’y a pas besoin de rechercher de l’eau plate.

Mais les caractéristiques de trainée limitent l’application des foils pour les hautes vitesses – à moins de limiter la surface du foil à l’extrême.

Ainsi, le foil sera bien adapté à des vitesses en dessous de 30kt. Il peut y avoir ici un avantage par rapport aux planches de windsurf car la trainée est moindre. Cela nous autorise à utiliser des voiles plus petites. Pour des vitesses plus élevée, la surface doit être également réduite ce qui repousse la vitesse de décollage trop loin. Par exemple, si l’on veut aller à 50kt il faudra utiliser une surface de 100cm2 qui ne décollera qu’à partir de 20kt.

Schema 12:Comparaison des courbes de trainée d’une planche qui plane vs un foil ainsi que les vitesses maximales qui peuvent êtres atteintes. Vent 20kts, course 120 degrés

Une comparaison de la vitesse maximale par rapport au vent qui peut être atteinte suivant les différentes configurations en windsurf.

Schéma 13: Vitesse maximale de navigation en fonction de la vitesse du vent. Comparaison avec trainée 0 (windsurf sur glace) , windsurf (planning)) et windsurf (foil) en fonction de différentes tailles de foil. Calculé avec une puissance de voile constante.

Les points a , b et c indiquent les points a partir desquels la planche au planing offre plus de vitesse que le foil. Avant cela, le foil va plus vite qu’une planche au planning en offrant moins de trainée.

On peut voir que le planning est bien plus efficace que la navigation sur foil à moins que la surface de l’aile du foil soit adaptée à la vitesse recherchée. Une vitesse de 54kt semble seulement possible avec un foil de 100cm2 avec un vent de 40kt.

Le controle d’un foil est très difficile, surtout en considérant qu’il faille gérer la stabilité longitudinale et latérale. La planche touchant l’eau à haute vitesse résultera automatiquement en une catapulte.

Est ce que quelqu’un est capable de contrôler un foil à 50kt? Aujourd’hui seules des vitesses de 30kt ont été atteintes.

Ainsi pour les planches de windsurf, les avancées potentielles en terme de vitesse restent limitées à cause des limitations physiques vues plus haut. Seuls de petites améliorations sont envisageables sur le matériel comme dans les conditions météo: plus de vent et un plan d’eau plat seront nécessaires.

Dans une configuration où le matériel est optimisé et où le rider a suffisamment de technique, le record du monde dépendra principalement de trouver la bonne combinaison de conditions entre la force, l’angle du vent ainsi que la qualité du plan d’eau

A Luderitz, à cause du canal « fixe », les angles de course possibles dépendent seulement de la direction du vent. Le rider n’a aucune influence dessus et ce n’est pas optimal. Cela signifie qu’il faut attendre un très gros coup de vent , avec l’angle parfait.

Tout ce qui est mentionné plus haut est valide également pour un kitesurf. Un kitesurf peut résister à beaucoup plus de force car le moment de gite est différent mais les performances hydrodynamiques d’un kite sont moins bonnes que sur une planche de windsurf

C’est pour cela que le Kite a un record un petit peu plus élevé que celui du windsurf!

Si vous êtes arrivé jusqu’au bout et que comme nous vous aimez la vitesse en windsurf, allez donc faire un tour du côté de nos ailerons de Slalom et nos ailerons de speed !